"Paradise" à l'île de Dondet

Notre 6ème pays: le Laos. Presque sur la frontière cambodgienne se trouve la region des "4000 ISLANDS", dont l'île de DONDET. Une bien belle introduction avant de monter vers le nord...

DONDET est une petite ile dont on peut faire le tour à pieds, par un chemin de poussière, en environ 3h. Elle accueille pas mal de touristes qui viennent passer quelques jours ou quelques semaines à lézarder dans des hamacs pour reprendre des forces au milieu de leur périple sac au dos. Ils n’ont que l’embarras du choix pour trouver une chambre ou bien un petit bungalow en bois, sur pilotis, c’est-à-dire une chambre avec un lit double et une moustiquaire, plus un balcon avec 2 hamacs, soit au dessus du Mékong (comme les 2 nôtres), soit quelques mètres plus loin, de l’autre côté du chemin. Au milieu des « guesthouses », de nombreux endroits pour manger ou boire un coup (toujours en terrasses ouvertes au dessus du fleuve), pour louer des vélos, changer ses dollars en Kip, se connecter à Internet, laver son linge, ou réserver ses tickets de bus pour le jour où on se décide enfin à quitter l’ile.

Mais la vie ne s’arrête pas aux touristes. Les locaux ont aussi leurs propres activités (même s’ils proposent tous des services pour les touristes). L’école accueille 115 élèves… avec 2 profs ! Les parents cultivent le riz (tout le centre de l’île est rempli de champs de riz, un peu marrons après la récolte), pêchent et construisent de nouveaux bungalows ! L’ambiance générale est nonchalante et touristes et locaux semblent vivre en harmonie, tous ravis de la vie insulaire. Ils échangent des « Sabadii » (bonjour) en souriant depuis les maisons, les terrasses et le chemin.

« Paradise » notre guesthouse est un lieu assez unique. Le restaurant appartient à un couple laotien (avec 4 enfants de moins de 7 ans) et les 7 bungalows à la sœur du mari. Ils vivent tous (y compris les parents) dans la maison attenante (enfin la grand-mère dans la maison en bois et bâches, et les autres dans la maison en béton, car elle n’a pas voulu déménager dans la nouvelle maison !). Dans la gestion, l’organisation, les traductions et les relations avec les touristes, ils sont aidés par un couple de retraités américains, Lance et Donna, ancien duo de blues baroudeur, qui se sont installés définitivement sur les lieux il y a 3 ans. Cela donne un super mélange ! Les éclats de rire et de voix de la famille, les enfants qui vous grimpent sur les genoux et jouent avec les touristes, petits et grands, la délicieuse nourriture locale… tout cela sans la frustration de ne pas pouvoir communiquer.

Lance et Donna peuvent traduire dans un sens comme dans l’autre pour s’assurer qu’on se comprend, et se font un plaisir de raconter l’historique de la famille ou d’expliquer la culture et les rituels laotiens (les fêtes d’accouchement auxquels ils ont assistées par exemple). Ils ont aussi peint les toilettes avec des couleurs et des décors extraordinaires, et réaliser le classeur qui contient le menu, mais aussi les photos qui présente la famille, un lexique de base, une carte de l’ile avec des commentaires et le détail des chemins au soleil et des chemins à l’ombre, le récit du jour où ils ont emmené un jeune cousin de la famille à la ville (à 3-4h de là) pour la première fois pour qu’il voit un dentiste (et se fasse arracher une dent pourrie)…

Le matin, on est réveillé assez tôt (à « boat o’clock » comme dit Donna) quand les premiers petits bateaux, avec leurs moteurs comme des débrousailleuses, longent l’ile pour aller par exemple au marché. Pendant le petit déjeuner, Lance prend généralement sa guitare et on a droit à de super blues. Quelques moments un peu surréalistes ! « Nobody knows you when you’re down and out » (un de nos préférés, repris brillamment par Clapton) ou des Beatles, ou ses chansons à lui… EXTRA ! Un matin, le spectacle a été poussé un peu plus loin. Bong, jeune oncle trisomique très attachant de la famille (22 ans, mais tout menu et d’un âge mental d’environ 7 ans) est venu se joindre à Lance en « chantant » et en dansant ! Ballades et rocks endiablés au rythme du public qui tapait dans les mains ! Un vrai showman ! Excellent !

Parmi les autres rituels, la douche ! « A la cambodgienne » comme dit Calvin. A la laotienne donc aussi ! Toute l’eau pour la cuisine et pour boire est de l’eau purifiée, livrée en gros bidons (comme pour les fontaines pour boire dans les bureaux, vous voyez ?). Mais pour tout le reste, c’est l’eau du Mékong ! Chaque maison a un fil électrique qui descend jusqu’à l’eau pour alimenter une petite pompe, et un tuyau qui remonte l’eau jusqu’au gros réservoir en hauteur. Un petit réseau de tuyaux alimente les divers robinets. Dans les toilettes et la douche, cela permet de remplir les réservoirs. Une casserole en plastique sert à verser l’eau, soit dans les toilettes pour faire la chasse (comme dans la majorité des toilettes en Asie du Sud Est), soit sur soi pour faire la douche. Il y a aussi un pommeau de douche pour faire « à l’européenne », mais les enfants trouvent ça beaucoup plus drôle de se jeter de l’eau dessus ! Bien sûr l’eau n’est pas chauffée, enfin un peu par le soleil dans le tuyau de douche dans l’après-midi... Mais de toute façon, une douche fraiche à la fin d’une journée bien chaude, ça fait vraiment du bien. On se sent tout propre, même si l’eau du Mékong est aussi marron que l’eau de la Garonne !

Lors de notre séjour à Dondet, il a fallu caser quelques bonnes heures de boulot scolaire. La date d’envoi des devoirs du Cned approchait à nouveau. Pas toujours facile de se motiver pour travailler vu le cadre, mais ça avance petit à petit malgré tout. Autres activités : se promener à pieds autour et à travers l’île, jouer avec les enfants de la famille, faire du badminton (grâce aux raquettes de Lance et Donna), faire du billard dans le bar-restau à côté (magnifique avec toutes ses lanternes le soir !)…

Un jour nous avons loué des vélos (Calvin assis sur le porte-bagages avec coussin intégré) pour aller explorer la plus grande île voisine, Don Khon. Les deux îles sont reliées par un pont qui ressemble fort au Pont de pierre à Bordeaux ! Normal, il a été construit par les français qui ont mis en place une petite voie de chemin de fer au 19ème siècle, pour faire passer leurs bateaux démontés du sud de Don Khon au nord de Dondet, car les rapides et les cascades rendaient impossible la remontée entre les îles. Les « cascades » que nous avons pu voir sur les rochers autour de l’île étaient impressionnantes… Qu’est-ce que ça doit être en saison des pluies ! On trouve aussi sur Don Khon de vraies plages, mais il faut faire attention où on se baigne, à cause du très fort courant. Dernier décès… novembre 2013 !

Nous avons donc passé 4 belles journées à Dondet, dont nous gardons de très bons souvenirs… sauf… l’histoire de la pêche… Je ne sais pas pourquoi mais les garçons (les nôtres, je veux dire) sont fascinés / passionnés par la pêche… pas mon truc, je dois dire, mais bon… Ils guettent toujours les occasions de pouvoir pêcher et nous avions repéré qu’une sortie pêche pouvait être organisée à la guesthouse où nous logions. Russ s’est proposé d’emmener les 3 garçons et de me laisser quelques heures pour moi (youpi !!) et il a donc réservé la sortie pour le lendemain. Carsten s’est également inscrit (Sandra préférant rester… sortie entre hommes !!). Les garçons étaient hyper excités la veille au soir et le matin de la sortie. Au programme : départ en bateau avec le père de famille, séance de pêche avec explications depuis une petite île (impeccable pour que Calvin puisse jouer à autre chose si besoin), poisson +/- garantis, puis feu sur place, grillade : poisson et « sticky rice » (riz collant)… durée prévue 5 bonnes heures… Le départ qui devait être à 10h, avait été repoussé jusqu’à 11h, puis presque 11h30 car le père était occupé. Les garçons étaient hyper impatients et super contents quand ils sont enfin tous partis (embarquant aussi 2 copains du père)…

Après m’être reposée un peu, j’ai passé une heure à organiser nos photos… du transsibérien ! Puis j’ai mangé avec Sandra et on a parlé des systèmes scolaires français et allemands… quand, à à peine 15h, on a vu rentrer le bateau, on était très étonnées… et les gars… pas contents du tout et très déçus… Aucune explication, 4 cannes à pêche pour 5 que le père a préparées et mis entre les mains de chacun à partir du bateau, à 3 endroits différents. Pas de poisson. Pas même pour lui. « L’eau est trop sale » disait-il… Pas d’île, pas de riz non plus… Ils ont fini par accoster. Le père et ses compères avaient trop faim, ils sont partis manger une soupe. Les « touristes » avaient mangé un petit sandwich, commandé (et payé par eux mêmes ) avant de partir… « au cas où »… Et au final, ils étaient rentrés bien plus tôt que prévu.

Le père avait bien dû senti que les « clients » n’étaient pas contents, mais pas d’échanges sur le bateau. Russ et Carsten avaient préféré attendre d’être rentrés et d’avoir Lance comme intermédiaire / traducteur. Lance et Donna ont parlé au père, mais aussi à sa femme pour expliquer le malaise. Tout d’abord si l’eau était « trop sale » (il s'y connait)... il ne fallait pas embarquer des touristes pêcher. Et il fallait au moins compenser par des explications sur la pêche locale et tenter de coller un peu plus au programme proposé. Russ pensait qu’un remboursement partiel ne serait pas trop demander. On a observé de loin les échanges au sein de la famille, y compris avec la mère du père...

Tout d'un coup, on a vu le père se mettre à HURLER (sachant que les laotiens ont la réputation de ne jamais élever la voix...!) et à redonner tout l'argent de la sortie à sa femme pour qu'elle nous le rende. "Qu'ils prennent leur argent, qu'ils fassent leurs sacs er qu'ils partent d'ici !!!"....gloups.... Puis il voulait que Lance et Donna (qu'ils appellent "Papa" et "Mama") s'en aillent aussi... ambiance... On était hyper mal, les enfants aussi... mais sa femme est venue nous serrer dans ses bras, nous disant de ne pas partir, qu'il était fou... Lance et Donna, pas inquiets, nous disait que les bungalows n'étaient pas à lui, qu'il n'avait rien à dire (se demandant s'il n'était pas sous l'emprise d'une drogue...)... et sa soeur nous a d'ailleurs confirmé plus tard qu'elle ne voulait pas qu'on parte... 

Bref, on est resté. Vraisemblablement l'ensemble de sa famille lui est tombée dessus (on a vu son père venir lui parler... et les anciens ont encore du poids dans ces cultures)... Nous, on ne l'a pas revu sauf le matin du départ, mais on a évité que nos regards se croisent. Sa mère, perchée dans sa maison sur pilotis, a redoublé de "Sabadii" à notre égard. Au moment du départ, sa femme et sa soeur, rirant ou souriant tout le temps, comme d'habitude, nous ont encore serrés dans leurs bras et nous ont mis à chacun des petits bracelets en coton pour nous porter chance et pour qu'on revienne, selon la tradition.

Au final, après nos 4 jours, nous étions donc tristes de quitter Donna et Lance avec qui nous avions bien sympathisé, cette famille charmante (en dehors du cas du père) et ce lieu tout à fait magique. Mais sur la carte du Laos nous n'étions que tout en bas, nous avons donc pris un bus vers le nord... et vers de nouvelles aventures !

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Commentaires

L'aventure continue, merci de nous faire partager votre voyage votre histoire, île de Dondet doit être superbe, vous faites des rencontres sympas et moins sympas et que cela ne vous empêche pas de continuer votre chemin, on pense à vous 5 de notre ville de Pessac ou le temps est à la pluie, bon courage aux enfants pour les devoirs scolaire qu'ils profitent de cette aventure ils auront de quoi raconter à l'école voilà. A bientôt Sophie et sa famille.