Le long du fleuve... tranquilles ?

Le bateau, tout en bois, d'une capacité de 40 passagers, est aux 3 quarts rempli, uniquement de touristes, transis de froid. La brume flotte à la surface de l’eau. Nous sommes tous enveloppés dans les couvertures en polaire du bateau. Beaucoup sont rose vif avec des gros Hello Kitty dessus !  

Pour remonter de  Luang Prabang vers Chiang Mai au nord de la Thaïlande,  4 solutions :

- un bus de 15h (autrement il faut eétaler sur plusieurs jours) :  de jour, quelle galère ! Quant au bus de nuit,  il n’a que des places assises... bof ! 

- l’avion, mais bien que ce soit rapide, c’est cher, mauvais pour l’environnement et ça nous prive de la découverte de certains endroits...

Il y a enfin 2 options en bateau (sur 2 jours dans les 2 cas)  :

- le "slow boat" : option la moins chère mais il faut apporter sa nourriture (et ça fait beaucoup quand on mange à 5... et sans samovar d’eau bouillante comme dans le transsibérien.... !) et réserver son hôtel pour la nuit-étape

- et une option plus chère, que nous avons choisie, plus "croisière" avec 2 petits-déjeuners et 2 déjeuners compris, ainsi que l’hôtel réservé à l’étape (no stress, s’était-on dit !!.... hum…) et une petite sortie du bateau chaque jour (malheureusement, un peu "voyage organisé" mais ça fera quand même une coupure).

Il existe aussi l’option "speed boat", connue pour être vraiment dangereuse, donc pas envisagée… !

A peine sommes-nous partis que le petit déjeuner nous est donc servi sur notre "bateau de croisière" : un croissant et un pain au chocolat chacun ! Quel luxe ! En milieu de matinée, nous nous arrêtons visiter la grotte aux bouddhas, un peu en hauteur, mais qui donne sur le Mékong. Tous les ans, pour le nouvel an bouddhiste (en avril), les habitants de la région apportent de nouvelles statues de bouddha. Il y en a des centaines de toutes les tailles, en divers matériaux et dans des positions variées. C’est très impressionnant ! Evidemment, on visite ça vite fait et en groupe…

Comment conserver l’âme d’un lieu de culte avec le passage de tant de touristes ? Surtout que contrairement aux temples habituels, la grotte aux bouddhas n’a pas de tapis, on ne retire pas ses chaussures, elle n’est pas entièrement close et les photos sont autorisées… Le lieu doit donc paraitre moins solennel à beaucoup qui n’hésitent pas à parler fort malgré les consignes… Je compense mon agacement, en prenant  moi-même beaucoup de photos de tous ces beaux bouddhas.

La "croisière" reprend. Un excellent déjeuner nous est servi, digne d’un très bon restaurant. C’est incroyable ce qu’ils arrivent à faire dans une minuscule cuisine de bateau ! Maintenant que la brume s’est levée, il fait bon et on peut admirer le fleuve parsemé de rochers de toutes tailles et flanqué de rives escarpées et couvertes de forêts denses. On peut aussi observer les diverses techniques de pêche (sur bateau, depuis la rive), les quelques habitations dispersées, les bateaux de marchandises ou de passagers qui circulent, dont les slow boats (comme des cars sur l’eau) et les speed boat qui transportent à toute vitesse une dizaine de passagers souvent casquées ! 

L’après-midi, on travaille, on joue, on écoute de la musique… On a aussi une discussion très intéressante avec l’accompagnateur d’un petit sous-groupe de 6 personnes. Il a été moine à Luang Prabang de 12 à 20 ans et nous lui posons de nombreuses questions sur ce sujet en particulier !

Mais tout d'un coup, vers 16h, voilà que le moteur fait un drôle de bruit... puis s'arrête... Le capitaine s'approche de la rive... Heureusement, nous n'étions pas dans les passages de rapides...! On apprend peu de temps après que l'hélice est cassée... Heureusement un autre bateau (slow boat) n'est pas loin et nous y embarquons avec tous nos bagages. Finalement, nous sommes assez chanceux...

Peu avant 19h, alors que le soleil se couche, nous arrivons à PAKBENG avec environ 1h30 de retard. Nous prenons tous nos sacs car nous ne savons pas dans quel bateau nous continuerons demain matin...

Pakbeng est un gros village, mais étant une étape classique entre la Thaïlande et Luang Prabang, il ne ressemble plus à un village local mais bien à un dortoir pour touristes de passage. Les divers passagers de notre bateau ont des réservations dans différents hôtels, en fonction du tarif choisi et de l'agence par laquelle le voyage a été acheté. Sur notre document de réservation,  pas de nom de guesthouse, mais l'accompagnateur du voyage ayant appelé l'agence, il nous donne un nom et une direction.

Nous remontons une rue assez raide pendant 10-15 min avec nos gros sacs puis trouvons la guesthouse. Ils n'ont pas notre réservation et sont peu aimables (Les touristes ne restent jamais plus d'une nuit. Pourquoi faire un effort ?). Russ redescend seul et sans son sac pour tenter de trouver l'organisateur (qui devait nous rejoindre pour vérifier que tout allait bien). Je garde les sacs et les garçons sur le trottoir un bon moment. Tout le monde a faim...

Russ revient avec l'organisateur et apparemment notre réservation a été faite ailleurs finalement... Nous devons redescendre la rue, en remonter une autre. Mais la guesthouse suivante a déjà donné nos chambres car nous sommes en retard ! Donc on nous propose 2 petites chambres avec chacune 2 lits simples dans une guesthouse très sale... 

Nous avons payé un supplément pour avoir un lit pour Calvin, donc nous ne sommes pas d’accord pour nous serrer dans 4 lits. Au final, on va encore un peu plus loin dans une guesthouse assez propre et on vous propose 3 chambres avec deux lits simples dans chacune. Birgit, une allemande qui était sur notre bateau (originaire de Munich comme Carsten et Sandra !) et qui voyage seule (un peu triste d’avoir quitté la veille sa compagne de route depuis 2 mois, Brigitte une québécoise !) nous explique que sa chambre aussi a été refilée à quelqu’un d’autre et qu’elle se retrouve dans une chambre très sale. Nous lui proposons de prendre le lit libre dans la chambre d’Oliver et de se joindre à nous pour un diner indien pour tenter d’oublier nos mésaventures… ! Elle accepte volontiers !

Le lendemain matin, nous embarquons sur le même slow boat que la veille, même brume et même température bien fraiche à 7h. Nous grignotons tous les petits déjeuners préparés par nos guesthouses, emmitouflés dans nos couvertures, jusqu’à ce que la brume se lève. 

La sortie de fin de matinée est la visite d’un village rural… Les échanges avec les gens, c’est ce que j’aime le plus dans le voyage, mais dans ces conditions ? Ce qui me console c’est que je sais que l’entreprise qui organise cette « croisière » reverse une partie de son chiffre d’affaire aux villages ruraux, apporte tous les mois des fournitures scolaires et d’hygiène à des villages partenaires et travaille avec diverses organisations pour améliorer les conditions de vie et les opportunités des populations locales… C’est déjà ça… Néanmoins ce jour là, nous sommes une bonne vingtaine de touristes (certains se sont arrêtés à Pakbeng) avec le guide à débarquer dans leur village. J’ai tellement peur qu’ils aient l’impression qu’on vient les voir comme on visite un zoo…

Heureusement 2 jeunes filles du groupe arrivent les bras chargés de petits livres pour enfants achetés à l’association Big Brother Mouse (voir billet précédent). Les enfants semblent ravis et se mettent rapidement à les feuilleter. Le prof du village n’a pas l’air si intéressé… Nous lui faisons quand même passé par notre guide (pour qu’il explique) quelques boites de crayons de couleur et taille crayons que nous transportons depuis la France, ayant l’espoir de visiter des écoles ou autres centres pour enfants… On espère que ça leur servira… 

Je n’ose pas prendre de photos dans le village. Je suis assez gênée comme ça… Au lieu de me promener, je décide de m’accroupir parterre près d’un arbre (comme font souvent les locaux). Les gens du village nous observent, les enfants en particulier. Peut-être que c’est plutôt nous les « bêtes curieuses » finalement ! Les cheveux de nos garçons font toujours leur effet ! Russ et les enfants viennent me rejoindre. Nous restons là un moment à sourire à un père, son jeune fils et une troupe d’autres enfants… On s’apprivoise mutuellement. On observe une veille dame étaler des graines parterre pour les sécher… mais déjà il faut repartir dans le bateau…

Cette petite escale me laisse songeuse quant aux relations entre touristes et locaux, aux meilleures orientations pour le développement d’un touriste responsable et respectueux, où les locaux peuvent être fiers de partager leur culture, où un véritable échange se produit… Nous l’avions bien vécu en Mongolie, mais perdus au milieu de la steppe, on était si loin du tourisme de masse…

Sur le slow boat, le repas de midi est aussi très bon et en milieu d’après midi, le bateau arrive près de la frontière. Nous transférons tous dans des tuk-tuks locaux, appelés « songthaews » : petits fourgons ouverts avec deux banquettes se faisant face pour accueillir environ 10 personnes (à moins qu’il n’y ait beaucoup de bagages à transporter.. !) Nous arrivons dans un immense hall, comme un hall d’aéroport… Puis nous devons affronter la douane laotienne suivie de la douane thaïlandaise. 

Il est connu qu’à toutes les frontières terrestres d’Asie du sud-est, les douaniers trouvent une excuse (c’est pour le tampon, c’est après 16h…) pour exiger une petite somme (voire toute petite) par passeport. Il est connu (de nous en tous cas, et le mec qui nous a délivré nos visas à l’ambassade du Laos à Phnom Pen nous l’a bien rappelé) que cette pratique n’est pas légale. Il est possible de tenir front aux douaniers, de leur demander un reçu (voire prendre leur numéro de badge et/ou leur photo)… ce qui avait marché pour passer sans payer à la sortie du Cambodge et l’entrée au Laos. Mais cette stratégie n’est pas facile à adopter quand on passe avec plein d’autres personnes qui payent sans rechigner (parce qu’ils ne savent pas que c’est illégal ou parce qu’ils ne veulent pas perdre de temps pour de si petites sommes). Mais… question de principe… il faut selon nous décourager toute corruption.

A la douane laotienne, nous expliquons que nous savons qu’il n’y a rien à payer en plus, que nous le savons des ambassades… Ils restent de marbre. Les autres touristes passent et payent tous 1 dollar… Le plus étonnant est que ce guichet se situe APRES le guichet qui tamponne les passeports pour la sortie du Laos (ils donnent un petit papier qu’un autre récupère 5 mètres plus loin !!)… Par contre il est avant le bus qui coute aussi 1 dollar et qui enjambe le Mékong pour passer en Thaïlande. Si nous tenons tête trop longtemps, nous risquons de rater notre bus… Très énervés, y compris les garçons (et nous le faisons savoir aux douaniers impassibles), nous finissons par payer…

A la douane thailandaise, Russ et moi faisons la queue à des guichets différents, à côté l’un de l’autre. On arrive à peu près en même temps. Ma douanière insiste. Je n’ai pas de monnaie thaïlandaise (vrai) pour lui donner les 5THB exigés (environ 11 centimes…. mais c’est pour le prin-ci-pe !!). Je n’ai pas de dollars (faux…) et surtout je ne comprends pas pourquoi il faut payer… Elle finit par lâcher et tamponne mon passeport et celui de Calvin. Celle de Russ refuse de plier quelques soient les arguments (sachant qu’elle n’a rien demandé aux passagers précédents !). Russ finit par reprendre les passeports et change de file où il ne paye donc pas pour les 3 autres passeports. Il reste encore à négocier un tuk tuk pour aller quelques kilomètres plus loin à CHIANG KHONG, la première ville thaïlandaise. 

Birgit a vécu avec nous toutes ces émotions. Elle décide comme nous de passer la nuit à Chiang Khong pour continuer vers Chiang Rai le lendemain. Tout semble tellement plus propre et en meilleur état qu’au Laos (Luang Prabang étant un peu une exception). Ça ressemblerait presque à l’Europe… et ça me rend un peu triste… Nous trouvons rapidement une guesthouse pour la nuit puis sur les conseils de l’accueil, nous marchons jusqu’à un petit restau très local (limite « street food »), non loin d’un coin de rue arborant un immense portrait lumineux de la famille royale ! On mange bien pour se remettre d’une dure journée, et Calvin et Dylan délirent avec un homme apparemment lié avec le restaurant, et vec ses enfants. Une rapide vérification de l’arrêt de bus pour demain et nous pouvons aller dormir pour reprendre des forces… !

 

 

 

 

Commentaires

On adore lire vos péripeties ! Merci de prendre le temps pour le blog. Nous ça y est, nous sommes 4 à la maison. Morgan est né le 26-01-2014. Mahé nest aux anges et il lui tarde de la présenter à ses copains et ses copines ainsi qu'à Dylan.On vous embrasse très fort et on pense bien à vous.Mahé, Morgan, Richard et Stéphanie

de LE présenter (c'est un petit garçon)

Bonjour, merci pour tous vos commentaires, vos récits me font voyager et sortir de la brume Lyonnaise. Bonne continuation!!!

Amicalement,

Charly

Coucou à tous les 5, c'est toujours aussi passionnant de lire vos aventures...Un grand bravo à Nat qui sait bien nous faire partager ses impressions et ses questionnements .Un grand bravo aux enfants qui ont bien de la chance de vivre une telle expérience !Je vous embrasse très fort, Marie-Jeanne

Oublié de me présenter, c'est fait...Je ne suis plus anonyme !!

Hello vous 5 !Je lis régulièrement le récit de vos aventures et ça me fais beaucoup de bien... j'en ai besoin en ce moment. Merci !!!! 

Salut à vous 5.Je vous suis (j'allais dire accompagne) depuis le début et à chaque fois j'ai l'impression de vivre une histoire hors du temps.  C'est impressionnant d'imaginer ce que vous êtes en train de vivre et c'est encore plus fort de se dire "wouah, quelle expérience de vie".Très gros bisous à tous (même si je pense que cette expression est aux antipodes de la culture de Russ) et toute mon affection dans votre périple.J'envie votre volonté et votre courage. Très amicalement.